J’ai eu un peu de mal à rentrer dans ce roman, j’ai trouvé le début insipide, fastidieux. Je me suis accrochée pour passer les premières pages. Et je ne le regrette pas. J’ai trouvé très intéressante l’histoire de la dernière léproserie d’Europe, sur Spinalonga, un îlot forteresse situé en Crète. Un secret de famille est le prétexte choisi par l’auteur pour nous conter la vie de cette communauté d’exclus, de parias, ces gens qui, en plus d’être les victimes d’une maladie terrible ont eu à souffrir de l’isolement, bannis, séparés de leur famille, parqués dans des mouroirs subissant l’ignorance et la cruauté des bien-portants.
Alexis, toute jeune diplômée, ne sait rien de sa famille maternelle, sa mère, Sophia, ne s’est jamais livrée, n’a jamais parlé de son enfance, de ses parents. Un mystère que la jeune femme décide de percer en allant passer ses vacances en Crète, à Plaka, le village natal de Sophia. Elle y rencontre Fotini, la meilleure amie de sa mère qui accepte de lui raconter l’histoire de sa famille. Et c’est là que ça devient très intéressant. On apprend que la grand-mère de Sophia, institutrice à Plaka attrapa la lèpre et dut abandonner ses deux petites filles Anna et Maria, sa maison, sa famille, ses amis, comme tous les autres malades et fut conduite, par son propre mari responsable du ravitaillement de la léproserie, avec un de ces élèves, sur Spinalonga, une presqu’île face à Plaka qui fut choisie en 1903 par les autorités pour y isoler les lépreux afin d’éviter la contagion. Depuis, la communauté de malades, allant jusqu’à 300 personnes, s’était organisée en une micro société, avec ses commerces, son office religieux, son école, sa mairie… La vie était rythmée par les arrivées et les décès jusqu’en 1939, où des malades arrivèrent d’Athènes. Instruits et décidés à vivre, ils dynamisèrent la communauté, exigèrent des aides, améliorèrent les conditions de vie, et firent de Spinalonga, un vrai village où il faisait bon vivre. Mais la maladie emporta Eleni avant que le remède ne soit trouvé. Quelques années plus tard, sa fille Maria, à la veille de son mariage avec un membre d’une famille puissante, découvre, horrifiée, qu’elle est atteinte de la lèpre. Elle est a son tour débarquée sur Spinalonga par son père. Bon raconté comme ça, ça fait un peu mélo, et je vous l’accorde : c’est un peu mélo. Et encore je ne vous ai pas parlé de la sœur Anna, une petite égoïste, détestable, jalouse et insatisfaite. Mais j’ai été très surprise par le contexte, étonnée d’apprendre que la dernière léproserie avait été fermée en 1957 seulement. Je pensais que ces « établissements » avaient disparus depuis longtemps, que les malades, depuis qu’un traitement avait été découvert, étaient suivis dans des hôpitaux classiques.
Ce roman a fait un carton apparemment, et ça ne m’étonne pas, il a l’étoffe d’un succès. Une saga familiale, les vilains pas beaux contre les gentils tout doux. Une belle panoplie de sentiments : les bons d’un côté, les mauvais de l’autre. Des clichés, des descriptions doucereuses, une écriture prosaïque, prise de risque=0. Mais un contexte bigrement singulier. A lire donc pour info.